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A voir son sourire et cette manière qu’elle a de guetter la première réaction de son interlocuteur, il va sans dire que la responsable des achats de pierres de Louis Vuitton a une belle carte dans son jeu. Elle l’abat devant nous un jour d’avril, dans son bureau ultra-sécurisé de la place Vendôme : un diamant de 56,20 carats, dans une teinte inhabituelle, entre le rose et l’orangé.
Le service marketing de la marque, soucieux de vanter la trouvaille, l’a nommé Cœur de Paris. Un baptême sémantique qui, en haute joaillerie, n’est réservé qu’aux plus belles gemmes. Les « pierreux », comme se surnomment en interne les gemmologues spécialisés, préfèrent l’appeler, eux, « le padpa ».
Un sobriquet dérivé de padparadscha, terme qui désigne ce mélange singulier et doux de rose et orange qui, d’ordinaire, ne se voit que dans les plus beaux saphirs sri-lankais. « Retrouver cette teinte dans un diamant est rarissime et prodigieux », souligne la responsable des achats, dont Vuitton réclame que le nom n’apparaisse pas pour des raisons de sécurité. Elle entend pour la première fois parler du brut (la pierre avant taillage) de ce diamant vers 2019, à un moment où le malletier, entré en joaillerie seulement dix ans plus tôt, n’a pas encore la légitimité ni l’appétit pour mettre la main dessus.
Deux ans plus tard, elle y revient. « Entre-temps, nous avions acquis de beaux diamants jaunes, verts ou orange », gemmes d’exception très convoitées. « Cette fois, il fallait quelque chose de différent. » Ainsi, Vuitton s’offre ce joyau en provenance de Bornéo – le sud-est indonésien de l’île, Kalimantan, est une zone diamantifère particulièrement prisée. « La mine historique d’où vient ce spécimen a connu ses premières extractions entre le VIIe siècle et le Xe. La production s’était arrêtée, avant de reprendre dans les années 1990 », précise la spécialiste.
Une fois taillée en Asscher, une taille spécifique en forme d’octogone brevetée en 1902 par le lapidaire néerlandais Joseph Asscher, la pierre a été présentée à Francesca Amfitheatrof, la directrice artistique chargée d’en faire un bijou. « J’étais à la fois bluffée par sa taille mais aussi prudente, dit-elle, car je suis toujours inquiète que des pierres aussi grosses paraissent trop masculines une fois montées. » Saphir de 17 carats, diamant blanc de 38, tsavorite de 65… Ces dernières années, Vuitton, qui aime aligner des chiffres records, l’a souvent chargée de travailler avec des gemmes dont le caratage frappe les esprits.
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